Nous avons évoqué lundi le constructivisme et vu que la réalité est une construction. Nous avons évoqué hier la définition de l’information, commencé à voir comment elle circule à l’intérieur d’un système et comment le retour d’information permet l’adaptation d’un dispositif.
Je vais essayer de vous expliquer aujourd’hui et en fin de semaine en quoi toutes ces notions nous permettent de mieux comprendre comment nous fonctionnons et comment mieux nous adapter.
Pour mémoire, revoici le schéma initial de fonctionnement des systèmes complexes utilisé par Norbert Wiener et le même schéma un peu « modernisé » : Ce sont deux scientifiques de génie qui vont utiliser ce schéma « cybernétique » pour mieux comprendre un système complexe un peu particulier : l’être humain.
Tous les deux vont décoder la manière dont l’être humain, comme tous les systèmes vivants, reçoit, traite, émet des informations pour évoluer et essayer de s’adapter dans ses relations.
Classiquement on considère 3 niveaux de relations :
- Les relations avec soi-même (ce que je me dis, ce que je pense de moi, ce que je me fais …),
- Les relations avec d’autres personnes : ce que je leur dis (ou pas), ce que je fais ou ne fais pas…
- Les relations que l’on a dans certaines situations et avec le monde en général
Le premier de ces grands hommes est Henri Laborit, célèbre pour être à l’origine d’une grande partie de la pharmacopée que nous utilisons encore aujourd’hui : antidouleurs, antioxydants, antidépresseurs… Dans les années 60 en France, Henri Laborit a adapté le schéma de Norbert Wiener. Il s’en est servi pour décrire le fonctionnement « interactionnel » de notre système nerveux central.
Voici son schéma que j'ai retranscris pour vous. Le rond rouge représente notre corps. Il décrit comment l’être humain est en interactions avec lui-même et avec le monde. Il évolue et s’adapte en traitant à la fois des informations internes et des informations externes, qui lui arrivent par les canaux sensoriels (par ses 5 sens). Il est d’ailleurs étonnant de constater que comme tous les systèmes vivants, ce qui fait réagir les marchés se sont des informations. Comme tous les systèmes vivants, ils réagissent à 2 types d'informations :
- Des informations endogènes : des niveaux symboliques de prix, des points pivots, des indicateurs particuliers, des moyennes...
- Mais aussi des informations exogènes : un évènement politique, une annonce de la FED, l'annonce de résultats d'entreprises...
C'est le traitement de ces informations qui les fait réagir et évoluer.
Mais Laborit va aussi être des premiers à poser les bases de ce qu’on appelle la biologie des comportements en démontrant que quelle que soit la situation à laquelle nous sommes confrontés , il n’y a « en réalité » que 3 modalités de réaction et d’adaptation possibles face à une situation :
- Si l’action est possible, nous pourrons soit éviter, soit contrôler la situation. Par exemple si nous croisons un animal dangereux, il est probable que bous essaierons de l’éviter. Par exemple encore, si nous voulons aidons nos enfants à faire leurs devoirs, il est probable que nous essaierons de contrôler ce qui se passe et comment ils s’y prennent.
- Si l’action est impossible (parce que nous ne pouvons ni éviter ni contrôler ce qui se passe), nous nous trouvons dans une situation un peu particulière. Cette situation ou ne pouvons réagir s’appelle l’inhibition de l’action. Les anglais l’appellent « freeze », nous sommes « gelés », incapables de bouger, comme un lapin devant les phares d’une voiture.
C’est aussi un processus très fréquent :
- Par exemple un salarié qui est mécontent de la relation avec son patron mais qui ne peut pas éviter d’aller au travail, mais qui ne peut pas non plus critiquer son patron par crainte de perdre son emploi
- Par exemple cette dame qui a une pratique religieuse intense et qui sait que son mari la trompe, mais qui ne veut pas divorcer parce selon ses croyances « cela ne se fait pas ». Elle subit la situation sans pouvoir ni l’éviter ni la contrôler
Ces sont 3 modes de réactions que nous retrouvons bien sûr aussi en trading :
- L’overtrading ou le « tilt », qui nous font essayer de surcontrôler ce qui se passe ey qui nous échappe
- l’utilisation de multiples indicateurs par laquelle nous recherchons une illusion de contrôle,
- le dégout, l’abandon, qui nous font éviter la confrontation aux marchés, et nous éloigner pour éviter la souffrance
- l’hésitation ou la paralysie, qui nous empêchent de cliquer au bon moment, parce que nous ne savons pas si nous devons entrer (action de contrôle) ou ne pas entrer (action d’évitement)
Nous verrons demain les apports majeurs du second de ces grands hommes : Grégory Bateson, qui va utiliser la cybernétique pour aller encore plus loin. Il va expliquer et théoriser les processus d’apprentissage et d'adaptation et révolutionner notamment l’approche de la souffrance humaine et des troubles mentaux,
En résumé, les enseignements à retenir de ces premiers pas sur les chemins de la connaissance sont les suivants :
- Le retour d’information est ce qui permet aux systèmes complexes de s’adapter
- Les systèmes vivants, et l’être humain en particulier sont des systèmes complexes. A ce titre, évoluent et s’adaptent en traitant des informations internes et externes
- Ce sont les retours d’informations qui les font réagir pour évoluer et s’adapter
- Selon que l’action est possible ou empêchée, il existe 3 modalités de réaction (d’adaptation) par rapport à une situation : l’évitement, le contrôle, l’inhibition de l’action.
- Aucune de ces modalités d’adaptation n’est problématique en soi : toute la journée nous évitons certaines situation, nous en affrontons d’autres, ou ne ne savons pas quoi faire
J'espère que cela vous aura intéressé et vous dit à demain.
Avec grand plaisir pour ma part
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