Bonjour,
Pour répondre correctement à la question posée Vargo, il faudrait connaître quelle était la conjoncture exacte, sur le plan économique, en France, entre1872 et 1883.
Même sans posséder des informations précises à ce sujet, il faut rappeler, avec Climatisor, que les gens qui possèdent de l’argent, peuvent le placer en actions ou en obligations.
Pour schématiser, disons que les actions se référaient, dans le cas qui nous occupe, aux entreprises privées, et les obligations à l’État français.
Les entreprises, en d’autres termes, finançaient leurs emprunts en émettant des actions, et l’État finançait son déficit budgétaire en émettant des obligations.
Et parce que cet même État, pour rembourser l’argent emprunté de cette façon - mettons après 10 ans (si l’échéance du titre était de 10 ans) -, cet État-là empruntait à nouveau en émettant un nouvel emprunt sur 10 ans ; et ainsi de suite, tous les 10 ans.
Cela signifie donc qu’il remboursait ses anciens emprunts (ici d’une échéance de 10 ans) avec de nouveaux emprunts de la même échéance.
Et parce qu’il est ainsi, la seule chose qu’il devait réellement payer, aux épargnants possédant des obligations à 10 ans, était le taux d’intérêt sur ces titres là.
D’où la notion de rente perpétuelle.
Quand donc les spécialistes disaient, à l’époque, que la rente sur l’
obligation de l’État français était, par exemple, de 5%, en 1860, et de 7%, en 1870 cela signifie que le possesseur du titre recevait 5% d’intérêt sur son titre, en 1860, et 7% d’intérêt sur son titre, en 1870.
Voilà pour le premier point.
Le second point est le suivant : dans la mesure où il existait, déjà à cette époque, un marché boursier ou les gens pouvaient vendre et acheter le titre susmentionné, cela signifie que le prix du titre était lié au taux d’intérêt attaché à ce même titre.
Imaginez, par exemple, que l’État émettait un nouvel emprunt, en 1860, avec une valeur faciale de 100 francs français, pour chaque titre, et que cette valeur-là correspondait à un taux d’intérêt de 5%.
Si, dix ans plus tard (soit en 1870), le taux d’intérêt du titre était de 7%, la valeur du même titre était descendu au-dessous de 100 (mettons à 95, on laisse tomber ici le chiffre exact).
Si donc l’État français empruntait de l’argent, en 1870, il payait, sur cet emprunt, un taux de 7%, aux épargnants.
Or l’épargnant qui avait placé son argent à 5%, en 1860, s’il vendait son titre, en 1870, sur le marché, à sa valeur de marché, précisément, recevait la somme de 95 francs.
Et parce que l’État français, en 1870, avait lancé un nouvel emprunt à 7%, cela signifie que la valeur de marché du titre nouveau, était, au moment du lancement de l’emprunt, de 100 francs français, laquelle correspondait à la valeur faciale du titre.
Mais cela signifie aussi que l’épargnant qui avait vendu son titre de 1860, au prix de 95, et qui recevait, jusque là, 5% d’intérêt sur ce titre, cet épargnant-là, en achetant le nouveau titre émis par l’État, en 1870, au prix de 100 (valeur faciale du titre), cet épargnant-là, en recevant 7% d’intérêt, sur le titre nouveau, émis par l’État, réalisait une opération blanche.
En d’autres termes il ne faisait ni pertes ni bénéfices
Ceci dit, il faut bien voir qu’en période de crise, comme c’était le cas en 1883, les épargnants vendaient leurs actions (émises par des entreprises privées) afin d’acheter des obligations émises par l’État français, car ils considéraient que les titres obligataires étaient des titres plus sûrs que les actions émises par les entreprises.
C’est la raison pour laquelle le prix de l’
obligation émise en 1872, et qui était de 84,50 francs pour un taux d’intérêt de 5%, était monté à 115 francs français en 1883, soit très au-dessus de sa valeur faciale de 100.
Mais cela signifie aussi que l’épargnant qui payait, en 1883, 115 frs, un titre pareil, au lieu de recevoir 5% d’intérêt, sur ce titre-là,recevait moins puisqu’il achetait son titre au prix de 115 au lieu de l’acheter au prix de 100.
Quant à l’État français, en voyant que les épargnants achetaient, en 1883, énormément d’obligations d’État, afin de sécuriser leur avoir, il va proposer, sur ses nouveaux emprunts, un taux de 4,5%.
Or son bénéfice se calculait, cette année-là, à la différence qui existait entre la valeur de marché du titre nouveau, et sa valeur faciale, qui était de 100.
Et si l'on se réfère, précisément, à la valeur de marché du titre nouveau (qui rapportait 4,5% d’intérêt à l’épargnant), celle-ci correspondait, forcément, en 1883, au prix de 115 frs rattaché à l’ancien titre (i.e. celui émis en 1872, et qui rapportait 5% d’intérêt, en valeur nominale, à l’épargnant, laquelle valeur nominale était différente de la valeur réelle associée au taux d'intérêt, en 1872, puisque la valeur de marché du titre était, cette année-là, de 84,50 francs au lieu d'être de 100 frs).
Quant à la valeur de marché du titre nouveau, émis par l’État, dans la mesure où elle était, en 1883 (année de crise) supérieure à 100 (chiffre représentant la valeur faciale du titre nouveau), cela signifie que les épargnants, en achetant le titre nouveau à un prix de marché qui était, mettons, de 102 francs, perdait 2 frs, au moment ou l'Etat leur échangea leur anciens titres contre des nouveaux, si le taux d’intérêt était, comme indiqué, de 4,5%., sur les nouveaux titres.
Pour ne rien perdre, les épargnants auraient dû acheter le titre nouveau, sur le marché, au prix de 100, lui-même correspondant à un taux d’intérêt qui, au lieu d’être de 4,5%, était supérieur à cette norme-là.
Or cette différence-là était tout bonus pour l’État français, puisque celui-ci profitait de la crise pour payer, à l’épargnant, un taux d’intérêt, sur les titres nouvellement émis par lui, qui était inférieur à sa vraie valeur (elle-même était déterminée par le prix de marché du titre lors de son émission).
Et parce que ce même État faisait du déficit, en 1883, en raison de la crise, la différence susmentionnée amoindrissait ce déficit-là, cette année-là.